"Parole incandescente prophéties d'amour"
En hommage à Fadwa Souleimane
Comme une réplique sismique de la soirée « Tu lis-tu ? : Quand l’Orient nous livre ses mots », la saison dernière au TANIT Théâtre, nous nous sommes réunis pour un travail poétique engagé auprès de Fadwa Souleimane.
Militante pacifiste, égérie de la révolution syrienne, elle apparaît comme la véritable voix, figure de la non-violence, contre le régime d’Al-Assad. Alaouite, comme lui, elle se montre comme « l’alaouite-qui-dit-non-à-Assad » pour contredire le cliché qui dit que toute cette communauté, représentant 10 % de la population syrienne, soutient le régime en place. Sa tête mise à prix, ses compagnons torturés et exterminés, elle s’exile à Paris en 2012 pour défendre la liberté et la dignité de ses compatriotes. Et sa voix, à nulle autre pareille, qui porte avec tant d’autres l’échec de la phase pacifique de la révolution syrienne, campe sur une position pacifiste radicale et plaide pour une révolution spirituelle : « Je refuse les armes, je refuse la guerre. Ce sont les idées, la pensée qui doivent conduire les politiciens ».
Programmer Fadwa, en ces temps incertains n’est pas anodin. Lisieux, ville doublement millénaire, détruite à plus de 80% lors de la seconde guerre mondiale, ne peut être indifférente aux déversements de bombes et aux pilonnages de mortiers qui défigurent depuis plus de huit ans des cités ancestrales d’une civilisation séculaire, l’un des berceaux de notre humanité, et engendrent le chaos et la migration de millions d’innocents et la mort de plusieurs centaines de milliers d’autres. « En 2011, je suis sortie dans la rue, nous sommes sortis dans la rue pour nous rebeller, pas pour engager une lutte armée contre le pouvoir. Je ne veux pas être “contre”. Le problème, c’est le pouvoir. Face à l’absurdité et au silence du monde, est-ce que l’Art change quelque chose ? Je me pose la question mais je continue pour être avec vous. »
Comment réveiller les consciences et se mobiliser face aux dirigeants du monde entier qui ont oublié les valeurs humaines et font passer l’intérêt de leur État avant la vie du peuple ? Comment défendre notre droit à la liberté et à la dignité ?
Au-delà de la révolution syrienne, Fadwa Souleimane, au nom de tout un peuple, interpelle notre humanité et notre responsabilité. Son chant, au-delà des murs et des frontières, réclame justice et porte l’espérance.
Arnaud Aubert.
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Article de presse« ô trônes de papier
ces chemins sont abreuvés du sang de mes frères
ils en sont ivres
et la terre n’oublie pas
elle les préservera
elle les glorifiera
elle les ressuscitera car un grain de blé
une fois semé
donne un épi de sept grains
à l’aspect identique
et au but unique
ô trônes de papier
coupez le grain de sa substance comme vous voulez
appelez-le ivraie si cela vous chante
l’univers qui vous écoute prend note
l’univers protège ses épis. »
Fadwa Souleimane